7 Février 2020

Solar Orbiter : merveille de technologies

4 instruments de télédétection, 6 instruments de mesure in-situ, un bouclier thermique, des capteurs d’images … et une foule de défis relevés !

Solar Orbiter embarque à son bord 10 instruments. La communauté française a très fortement contribué à la réalisation de 6 d’entre eux. Le CNES était maître d’œuvre de RPW, qui va mesurer les champs magnétique et électrique, et maître d’ouvrage des contributions françaises à 5 autres instruments – SPICE, SWA, EUI, PHI et STIX. « Sur ces 5 instruments, nous avons également apporté une assistance technique importante aux laboratoires, en leur apportant des experts qu’ils n’avaient pas », explique Isabelle Fratter, chef de projet Solar Orbiter (contributions françaises).

Télédétection et mesure in-situ

L’une des spécificités de la mission Solar Orbiter repose sur le fait que les instruments combinent mesure in-situ et télédétection. « Cela nous permettra de « remonter des événements à distance », précise Eric Lorfèvre, responsable d’affaire RPW. Autrement dit, lorsqu’un événement aura lieu à la surface du Soleil, nous serons capables de mesurer les effets de cet événement au plus près du Soleil (via la télédétection) et au plus près de la sonde (via la mesure in-situ) en même temps. »

A bord, 6 imageurs, fonctionnant dans des longueurs d’ondes différentes, permettront d’observer ce qui se passe précisément à la surface du Soleil. Ils ne fonctionneront que 30 jours par orbite, sur trois fenêtres de 10 jours au voisinage des périhélies. « C’est une question de capacité de stockage des mesures à bord et d’opportunités de transmettre ces mesures au sol : la capacité de transmission étant limitée, nous devons sélectionner des zones privilégiées à observer » indique Isabelle Fratter. Les instruments de mesure in-situ, eux, seront opérés en permanence.

Communication entre les instruments

En cas d’événement important, les instruments pourront communiquer entre eux pour « réveiller » ceux qui hibernent et ainsi coordonner les mesures. Ce qu’on appelle le « flag ».

« Lors des éjections de masse coronale par exemple (EMC), le flag s’active ce qui permet aux instruments d’effectuer leurs mesures au bon moment ». 

 

Des défis organisationnels et techniques

Un projet avec de multiples partenaires européens est toujours un défi de taille. Multipliez cela par le nombre d’instruments de Solar Orbiter et vous aurez le degré de complexité d’organisation de cette mission ! Mais le plus gros challenge a été technique.

« Le grand défi a été le choix des matériaux, explique Isabelle Fratter. Il s’agit tout d’abord d’une question de température : même si la sonde est dotée d’un bouclier thermique, certaines parties, comme les antennes de RPW, ne sont pas protégées par ce bouclier et doivent résister à des températures supérieures à 500 degrés. »

Autre phénomène à contrôler : le dégazage des matériaux. Il s’agit d’un phénomène physique normal qui se produit lorsque les matériaux sont placés dans l’espace, sous l’effet du vide et de la température. Or la sonde embarque des instruments d’optique. « Il faut éviter que des matériaux dégazent et recouvrent les optiques de contaminants moléculaires, de « poussière ». Les capteurs UV sont particulièrement sensibles à cela. Ce serait une véritable catastrophe. »

Il y a également de nombreuses contraintes électromagnétiques et électrostatiques. « Le plasma solaire est un milieu électriquement chargé, qui va donc charger électriquement le satellite. Pour s'assurer de la précision des mesures, il faut un revêtement conducteur afin qu'il n’y ait pas d’endroits qui se chargent plus que d'autres, ajoute Eric Lorfèvre. Par ailleurs, il y a eu un gros travail de design électronique afin d’assurer la propreté électromagnétique des instruments. » En clair, si des équipements à bord ne sont pas propres, les mesures pourraient être affectées par des fréquences parasites ou du « bruit » produits par les instruments. Par ailleurs, « Les matériaux utilisés ne doivent pas perturber le champ magnétique », conclut-il.

Toutes ces contraintes – thermiques, électromagnétiques – sont parfois, antinomiques ! « Des matériaux parfaits pour résister à la chaleur peuvent être de mauvais conducteurs électriques et inversement, précise Isabelle Fratter. Toutes les contraintes sont difficiles à satisfaire en même temps. Surtout que les 10 instruments de Solar Orbiter représentent une vingtaine de capteurs différents qui sont des instruments à part entière. »

Défis relevés puisque Solar Orbiter est prête à être lancée. Après la recette en vol de trois mois, les instruments de mesure in-situ seront opérés en permanence. Les instruments de télédétection seront eux, allumés de façon occasionnelle pour être calibrés, lors de la croisière.

Et après environ 22 mois de voyage, Solar Orbiter arrivera sur son orbite opérationnelle pour nous révéler les mystères du Soleil. Rendez-vous en novembre 2021 !